Article publié dans »Réussir votre Santé – 1996
L’étude des développements de la théorie pasteurienne permet de mieux comprendre la crise des sciences médicales. D’un point de vue épistémologique on peut
souligner que cette théorie passe par toutes les étapes caractéristiques des paradigmes scientifiques. La première étape c’est-à-dire l’établissement de la nouvelle théorie, est caractérisée par
une forte opposition. De nombreuses critiques s’y opposent et les conceptions de Pasteur coexistent parmi d’autres. Robert Koch, prix Nobel pour ses travaux sur la tuberculose, trouve que Pasteur
généralise trop vite. Il essaiera de trouver les limites de la nouvelle conception. La critique de l’Académie de médecine est beaucoup plus violente et critique le dogmatisme de la théorie. Le
docteur Rossignol déclara « voulez-vous du microbe, on en a mis partout. La microbiolâtrie est aujourd’hui tout à fait à la mode, elle règne en souveraine, c’est une doctrine que l’on ne
discute pas, on doit l’admettre sans réplique du moment, surtout, quand son grand prêtre, le savant Pasteur, a prononcé le mot sacramental : j’ai dit le microbe seul est, il doit être la
caractéristique d’une maladie, c’est entendu et convenu : désormais la théorie des germes doit l’emporter sur la clinique pure, le microbe seul est éternellement vrai et Pasteur est son prophète
». Malgré les critiques, la simplicité des explications des phénomènes pathologiques ainsi que le succès spectaculaire dans des maladies telles que la rage, assurèrent son succès.
Pasteur : la crise d’une théorie
Les idées pasteuriennes sont l’un des piliers de la science contemporaine. Elles ont transformé la pratique médicale, depuis la conception de la maladie jusqu’à
la compréhension de la biologie.. Les principaux acquis pasteuriens sont : l’antisepsie, la théorie des germes, la conception de la spécificité microbienne des infections, les moyens
thérapeutiques basés sur l’atténuation de la virulence des micro-organismes pathogènes.
Cette révolution épistémologique s’est produite il y a environ 120 ans. La médecine était alors l’hôpital pour se transporter au
laboratoire, à la recherche des micro-organismes. Les médecins pasteuriens, soutenus par le grand mouvement hygiéniste, désiraient réaliser les rêves des positivistes : « rendre humanité heureuse
grâce à la science ». La voix de la microbiologie devait permettre de réaliser ce rêve.
La pratique thérapeutique pasteurienne, comme chacun sait, consiste à déterminer « un microbe » incriminé afin de l’isoler et le cultiver in vivo pour
produire un vaccin capable d’atténuer sa virulence.
Cette pratique domina la médecine pendant tout le XXe siècle. La théorie pastorienne est devenue officielle. On peut même dire qu’elle est devenue sacrée, dominant
à ce point la pensée scientifique au point de rejeter les résultats contradictoires. En effet, la conception thérapeutique pasteurienne est de plus en plus souvent mise en doute. D’une part, elle
n’a pas tenu ses promesses de vaincre toutes les maladies. De plus, il n’est plus possible de maintenir le caractère général et réductionniste de cette théorie. L’échec des recherches
microbiologiques dans diverses maladies, les variations dans la virulence des micro-organismes selon le comportement humain, le grand nombre de porteurs de microbe non malade, la non efficacité
des vaccins sont autant de raisons de remettre en doute son dogme.
La seconde étape de l’histoire de la théorie pasteurienne est celle de l’orthodoxie.
L’idée que les microbes sont les seules causes de toutes les maladies triomphe. Tous les résultats restant en désaccord avec la
conception microbiologique sont rejetés. Les résultats provenant de divers laboratoires obligent cependant les pasteuriens à accepter l’existence de phénomènes difficiles à expliquer par la
théorie orthodoxe et même à réviser certains principes de la conception microbiologique. En 1906, Neissser et Massini fournirent la preuve de la variabilité des bactéries (phénomène rejeté par
les pasteuriens).
Mais le premier grand échec de la conception pasteurienne est lié à la découverte des vitamines dans les maladies de carence.
Jusqu’à la découverte de la thiamine par Casimir Funk, certaines maladies comme le béribéri, le scorbut ou le rachitisme restaient des énigmes pour la médecine. On
savait seulement que ces maladies étaient liées au régime alimentaire. Pour éviter le scorbut, les marins au long cours avaient pris l’habitude d’enrichir leur menu (composés normalement de
viande séchée et de poisson) avec des aiguilles de conifères (Jacques Cartier) de choucroute (James Cook) ou avec des agrumes (Magellan). En 1804, après la publication de l’ouvrage de James Lind,
le ministère de la marine obligea à tous les navires britanniques à emporter un stock d’agrumes. En dépit des succès obtenus (que personne ne pouvait expliquer), les biologistes XIXe siècle
refusaient de croire qu’une maladie puisse guérir grâce à un simple régime alimentaire, en particulier au moment où la théorie microbienne faisait son apparition. Ainsi, Christian Rjiken parti en
Indonésie à la recherche du micro-organisme responsable du béribéri. Ces découvertes permirent de modifier le point de vue de la cause de la maladie. Il constata en effet que les personnes
malades appartenaient au consommateur de riz décortiqué. Il supposa alors que la partie décortiquée du riz devait contenir quelques substances ayant une action préventive sur le béribéri.
De nombreux chercheurs tentèrent de découvrir cette mystérieuse substance responsable du béribéri.
Généralement ils l’ont situé dans un des grands groupes alimentaires : les protéines (Hopkins et Steppe) les minéraux (Rohnan),
les protéines (Martin) ou éventuellement dans le manque de variétés dans l’alimentation des quatre éléments. Il fallut attendre Casimir Funk et la parution de son livre « Histoire des
conséquences pratiques de la découverte des vitamines. Introduction à l’étude des vitamines » (Paris – Vigot Frères 1924). Dans cet ouvrage, Funk présente les circonstances qui ont
accompagné sa découverte. Après de longues recherches et après avoir émis plusieurs hypothèses, il parvint à isoler la substance remède capable de soigner le béribéri. La notion de « vitamines »
était inventée il en fit part pour la première fois dans son article « The ethiologie of the ddeficiency diseases » publié dans le journal of states Medecine – juillet 1912 –
pour forger ce terme de « vitamines », il avait fait l’agrégation des mots Vita (en latin la vie) et amine, (car il pensait que toutes les substances découvertes appartenant à ce groupe ont le
caractère des amines). Plus tard, lorsqu’il fut évident que certaines vitamines possédaient un caractère différent que les amines Funk élimina la dernière lettre « e », changeant le mot anglais
de vitamine en vitamin.
La découverte des vitamines et des maladies héréditaires ont montré clairement l’existence d’autres processus de maladies, différents des pathologies
microbiennes.
Le monopole de la théorie pasteurienne était terminé. Le dogme pasteurien entra dans ce troisième phase, celui de l’acceptation limitée des seules maladies
contagieuses. Dans cette phase « évolutive » elle essaiera de se modifier pour pouvoir expliquer les différents phénomènes antérieurement rejetés ou inconnus. Même sur son propre terrain des
maladies contagieuses la théorie pasteurienne fut obligée de coexister avec les autres conceptions des états pathologiques. Les conceptions physico-chimiques, débutées par la théorie colloïdale
est suivie par la théorie quantique, estiment que les changements des paramètres physiques (pH, résistivité, état quantique…) Sont les causes des maladies dans ces cas-là, le rôle des
micro-organismes est limité à la modification de la matière. Le microbe est donc seulement l’un des nombreux facteurs modificateurs. Certaines conceptions, issues de la biologie moderne de la
symbiose, prétend d’ailleurs que l’organisme vit toujours en équilibre avec les micro-organismes. C’est l’interruption de cet équilibre qui est la cause des maladies.
Les vitamines
depuis la découverte de la catégorie des vitamines, la signification de cette notion a évolué. Pour définir les vitamines, on utilise diverses propriétés de
ce groupe de substances :
1 – la nécessité des vitamines pour la vie ce caractère déjà utilisé par Funk est montré dans le nom même de vitamine (vitae).
2 – le caractère chimique de ces substances fut mis en avant. Plus tard, en découvrant que cette catégorie contenait d’autres substances que les amines on ne l’a
plus utilisé.
3 – l’incapacité de l’organisme à synthétiser des vitamines et par conséquent, leur caractère extérieur.
4 – la très faible quantité utilisée par organisme.
5 – la fonction des vitamines dans l’organisme d’abord perçu comme régulatrice (équivalente à la fonction des hormones) et plus tard comme élément de catalyse
enzymatique (catalyse ou groupe prosterique).
6 – la maladie qui est une conséquence de la carence en vitamines.
7 – le fait que les vitamines constituent la cinquième grande catégorie alimentaire.
8 – le caractère évolutif des vitamines en fonction de la carence : la substance des vitamines pour la des organismes ne l’est pas nécessairement pour
l’autre.
Actuellement, théorie pasteurienne entre dans sa quatrième phrase. La crise est profonde et peut se terminer par le rejet
de cette théorie.
Pour la première fois, une maladie reconnue contagieuse échappe au principe pasteurien. L’épidémie de sida sonnera-t-elle le glas
de l’une des plus puissantes conceptions de la biologie moderne ? Pour trouver une solution, la science sera-t-elle obligée de faire appel à de nouvelles conceptions ? Le bilan de la théorie
pasteurienne sera-t-il jugé par la médecine ? Il y a 70 ans déjà, le professeur Kapoczewski décrivait la crise de la médecine pasteurienne. Il annonçait une crise de la biologie en général et de
la conception de la maladie (en particulier le cancer), les recherches d’un virus du cancer n’ayant pas donné de résultats pas plus que toutes les autres explications de cette maladie. Il
écrivait « malgré les nombreuses descriptions des microbes incriminés ou suspects, aucun n’a pu provoquer expérimentalement le cancer. Il faut considérer tous les microbes incriminés ou suspects
comme des témoins d’une affection secondaire n’ayant aucun rôle dans la genèse du mal. Cela ne veut pas dire que les microbes, en tant que cellules
étrangères à l’organisme n’interviennent pas dans l’éclosion d’une tumeur mais bien qu’il faut être plein de prudence et de réserve chaque fois que réapparaît l’annonce de la découverte d’un
véritable virus du cancer ». Il ajoute avec ironie qu’au moins une fois par an on découvre un nouveau microbe du cancer, alors que l’histoire ne connaît pas une seule épidémie de cancer. Dans la
recherche sur le cancer si tout est positif en sciences physiques, tout est négatif dans les recherches bactériologiques.
Kapoczewski ne critique pas la conception microbienne des maladies « l’idée que toutes les maladies relèvent d’une notion microbienne » qu’à l’occasion des
recherches oncologiques. Dans son article sur la météorolo-pathologie, il écrit « on néglige le rôle du facteur climatique, l’avènement de la bactériologie a relégué au dernier plan des
préoccupations médicales le rôle des influences saisonnières, climatiques, météorologiques et autres, surtout que leurs actions ne s’expliquent pas clairement ». Il croyait que la naissance de la
physique moderne permettrait à la médecine de sortir de l’impasse de la théorie microbienne dans un avenir proche. L’histoire confirmera-t-elle les opinions de Kapoczewski ? Il est probable que
les années à venir apporteront une réponse à toutes ces questions.
Une critique de la théorie pastorienne de la vaccination :
la conception du Docteur Jules Tissot
le Docteur Tissot fut professeur de physiologie expérimentale au muséum d’histoire naturelle de Paris. Il est l’auteur différent travaux et publications sur la
physiologie début, les phénomènes thermiques énergétiques de l’organisme, la physiologie des glandes, la respiration et le système nerveux… Huit prix
scientifiques ont couronné ses travaux dont deux décernés par l’Académie de médecine. Il était l’un des plus importants opposants à la théorie pastorienne ainsi qu’à la pratique de la vaccination
et fonda sa propre théorie des états pathologiques. Dans sa conception « les bactéries n’ont pas individualité, car elles ne sont que les éléments d’organismes plus complexes du groupe des
mycettes ». Après Tissot, les bactéries sont des unités de base (comme les cellules dans la théorie cellulaire) des organismes. La décomposition des structures mycéliennes en bactéries serait la
cause des maladies. Certaines maladies comme la tuberculose, aurait donc un caractère autogène. D’après Tissot, la libération des bactéries par suite de la décomposition du maïs cause la fièvre
typhoïde, celle de la laitue de la rougeole ; la carotte, la rage ; la pomme de terre, tétanos. Tissot a par ailleurs attaqué tous les dogmes pasteuriens : la panspermie atmosphérique des
bactéries, l’asepsie des organismes vivants, le mono morphisme bactérien, le dogme de la contagion bactérienne. Bien que les conceptions, valeur historique, il est intéressant de suivre sa
critique des vaccinations. Il a ainsi publié « la catastrophe des vaccinations obligatoires » ouvrage dans lequel il met en évidence les accidents dus à la vaccination. D’après lui, de 1941 à
1948 les vaccins ont inoculé 150 000 cas de diphtérie causant la mort de 15 000 enfants. Le silence de la presse discale et politique sur ce sujet, serait dû aux intérêts financiers
liés à la production des vaccins. Il aurait mieux valu d’après lui, les aliments plutôt que d’utiliser les vaccins.
Piotr Daszkiewicz - Jean Aikhenbaum
Sources :
Salomon-Bayet Claire « pasteurs et la révolution pastorienne »
Dubois René « Louis Pasteur – Free Lance of science »
Georges André « Pasteur »
Vallery-Rado Maurice « Pasteur. Un génie au service de l’homme »
Dragonnet François « méthode des doctrines dans l’œuvre de Pasteur »
Funk Casimir « histoire de la découverte des vitamines »
Kapoczewski Ladislas « les bâtisseurs de la science »