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26 octobre 2011 3 26 /10 /octobre /2011 16:52

Je ne voyais encore dans le Juif qu’un homme d’une confession différente et je continuais à réprouver, au nom de la tolérance et de l’humanité, toute hostilité issue de considérations religieuses. En particulier, le ton de la presse antisémite de Vienne me paraissait indigne des traditions d’un grand peuple civilisé. J’étais obsédé par le souvenir de certains événements remontant au moyen âge et que je n’aurais pas voulu voir se répéter.58/59

Un jour où je traversais la vieille ville, je rencontrai tout à coup un personnage en long kaftan avec des boucles de cheveux noirs.

Est-ce là aussi un Juif ? Telle fut ma première pensée.

A Linz, ils n’avaient pas cet aspect-là. J’examinai l’homme à la dérobée et prudemment, mais plus j’observais ce visage étranger et scrutais chacun de ses traits, plus la première question que je m’étais posée prenait dans mon cerveau une autre forme :

Est-ce là aussi un Allemand ?

Adolf Hitler – Mein Kampf

 

 

 

Les « gangs » de Berlin en 1931 – récupérées tout d’abord par les communistes et ensuite par les nazis.

 

Des « gangs », en bandes organisées de jeunes criminels, de 13 à 18 ans sévissent à Berlin, des jeunes voyous sont réunis en une centai­ne de « cliques » (c'est le nom qu'on donne à ces groupes). Beaucoup de ces jeunes gens sont des échappés de maisons de correction, certains d'entre eux, après avoir été repris, se sont évadés jusqu'à 20 fois. Nombreux, parmi eux, sont les chômeurs. N'ayant pas de travail, ils deviennent une charge pour leur famille, qui les considère d'un mauvais œil. Ils se joignent à des camarades du même âge, avec qui ils entreprennent souvent des excursions de week-end. On peut les voir dans certaines gares de Berlin, notamment le Stettiner Bahnhof, avec des équipements des sacs, ustensiles de cuisi­ne, et des provisions qu'ils ont volées. Ils sont accompagnés de fillettes qui portent le nom de « Cliquenkühe.

Ces bandes portent des noms dignes des ro­mans policiers, tels que « Sang de Tartare » « Pirates de l'Est », « Lumière du Nord ». Chacune d'elles a à sa tête un « Bull », qui doit s'être distingué par quelque exploit, par exemple le vol d'une auto.

La police connaît les repaires de ces ban­dits en herbe, mais elle ne peut pas faire grand'chose contre eux. Il est rare qu'ils soient pris en flagrant délit, et dans ce cas, ils ne subissent que de légères condamnations.

Les « Gangs » sont, jusqu'à présent, une spécialité de Berlin. Aucune autre grande ville allemande n'en possède. Arrivés à l'âge d'homme, ils adhèrent fréquemment au parti communiste, où leurs instincts batailleurs peu­vent se donner libre carrière pour rejoindre ensuite le parti nazi.

 

Le Reich en 1934

 

Les événements d'Allemagne viennent de le prouver une fois de plus. La journée du 30 juin n'a-t-elle pas provoqué partout et à tous les égards un effet de stupeur ? Elle avait pourtant été précédée d'une série de fissures et de craquements qui faisaient parler d'une crise dans le mouvement nazi. sinon dans l'Etat national-socialiste du 3ème  Reich.

Querelles religieuses ; mécontentement des milieux économiques ; duel oratoire entre von Papen, homme des conservateurs et des réactionnaires allemands, et Goebbels champion du racisme le plus orthodoxe, plus catégorique ; conflits locaux avec les Casques d'acier ;

 bref, frictions de plus en plus fréquentes sur tous les terrains, entre les éléments Junkers et les nazis nationaux-révolutionnaires, c'est-à-dire entre ceux qui n'avaient accepté la révolution de la croix gammée qu'avec l'idée non seulement de la freiner mais de la retourner, et ceux qui voulaient la développer davantage

 

Premières éliminations en perspective

 

Le premier avertissement, dont nous avons déjà parlé, ce fut le fameux discours prononcé à Marburg par le vice-chancelier von Papen.

 

Dans ses parties essentielles, il était demeuré inédit. Mais on en a publié, après coup, une phrase particulièrement significative. Ce serait un crime de ne pas dire en cette heure décisive ce qui doit être dit : Un véritable homme d'Etat a deux taches  en premier lieu, répondre aux exigences du temps. Mais ce qu'il doit encore moins oublier, c'est faire ligure de géant, c'est-à-dire se dresser contre les éclaboussures du siècle et rejeter soin derrière soi les fous excités et les mauvais garçons qui ne suivent le mouvement que pour profaner la grande œuvre entreprise.

 

Les mauvais garçons  n'entendirent  point. Ils eurent tort, Car il semble bien que leur Führer n'était pas tout à fait étranger à cette déclaration, prophétique.

 

  Le Dr Goebbels, ministre de la Propagande, répondit à son collègue par plusieurs harangues. A Essen, notamment, il parlait des ralliés ” de la dernière heure qui, maintenant, grognaient tout en se terrant. Il stigmatisait les conservateurs, les réactionnaires. C'était donc à eux que s'appliquait la phrase : “ Si nous les laissons tranquilles, c'est uniquement pour qu'ils puissent sortir de leur trou, ils ne perdent rien pour attendre ”. Il aurait cependant fallu prendre garde à quelques autres passages de ce discours; le ministre de la Propagande y faisait allusion à la lenteur nécessaire des réalisations sociales promises autrefois par les nazis. N'y avait-il pas là un avertissement, plus sympathique, plus discret sans doute, que celui de von Papen, mais un avertissement tout de même aux militants trop pressés ?

 

Troisième avertissement : le plus important.

 

Le 29 juin, le. général von Blomberg, ministre de la Reichswehr, publiait en première page du journal officiel d'Hitler, le  Voelkischer. Beobachter, un article intitulé : L'armée dans le III° Reich. C'était d'abord une réponse à ceux qui, notamment à l'étranger, parlaient de la possibilité d'un complot réactionnaire, appuyé par l'armée, contre Hitler. C'était ensuite une menace non dissimulée à l'adresse des troupes d'assaut ou du moins de leurs cadres les plus remuants. Le ministre n'hésitait pas à écrire : L'esprit prétorien, n'est pas conforme à l'âme de notre soldat...

 

Nous le prendrons ainsi les choses à leurs commencements et cela vaudra peut-être mieux pour débrouiller les phases véritables de cette  tragédie dont les aspects sont si complexes tandis que beaucoup de ressorts, d'intrigues et de péripéties nous échappent encore. A  vouloir offrir du premier coup une solution globale des nuits mystérieuses de Berlin et  de Munich, tels de nos confrères soutiennent, avec le même fracas et la même gravité, blanc un jour et noir le lendemain.

 

Ainsi, Hindenburg, après avoir été présenté comme un pauvre homme pleurant et sup­pliant pour obtenir le salut de quelques amis menacés, devient le maître qui a im­posé “ le coup ” à l'élève docile Adolf. Ou bien Goering, dénoncé dans une édition comme ayant “ donné ” les conspirateurs à Hitler parce qu'ils ne lui faisaient pas la première place, apparaît dans la suivante comme ayant agi en dehors d'Hitler qui né­gociait avec Gregor Strasser et promettait à ce dernier la suprématie guettée avi­dement par l'ancien as de guerre... De même il y a eu — toujours suivant la pres­se — tantôt complot réel pour démontrer la décadence du dictateur, tantôt invention satanique afin de prouver l'abdication to­tale du prophète national-socialiste.

Au contraire, en avançant pas à pas, on aura quelques chances d'éviter ces erre­ments par trop contradictoires.

 

 

La nuit des longs couteaux

 

Hitler, par un mélange de pseudo-légalité et de violence politique, étend son pouvoir, tirant pleinement parti de l'enthousiasme qu'a suscité son arrivée à la chancellerie ainsi que des divisions de ses opposants.

 

Le 30 juin 1934, lors de la sanglante Nuit des longs couteaux, il élimine Ernst Röhm et les chefs SA les plus gênants, tandis qu'il confie à Göring le soin d'éliminer le général Kurt von Schleicher et l'opposant nazi ''de gauche'' Gregor Strasser, gagnant ainsi l'estime de l'armée.

 

Le 2 août 1934, la mort de Hindenburg lui permet de cumuler les fonctions de chef de l'État et de chef du gouvernement. Le 18 août, plus de 89 % des électeurs allemands ratifient les nouveaux pouvoirs du Reichsführer. En un an et demi, Hitler est parvenu à instaurer un pouvoir sans partage, les opposants politiques sont assassinés ou internés dans les camps.

 

Allemagne : Adolphe Hitler chancelier du Reich, Une victoire de l’obstination... mais un avenir incertain.

 

Les S.A – les sections de choc du national-socialisme constituent des formations para militaires très distinctes des autres. Ils ont un rôle de premier plan dans les phénomènes de la guerre civile et du racisme. Ils vivent de manière quasi militaires, logent dans des casernes, d’où ils ne sortent que pour effectuer leur besogne – aller au combat – expéditions punitives. Les 300.000 S.A encadrés par leurs 10.000 chefs sont unis par un fanatisme commun. Leurs sections comptent tous les  réprouvés d’avant guerre dont Ernt Von Salomon assassin notoire, Neuman ex-condamné à mort pour assassinat politique. Ils s’entretuent au besoin, des militants sont assassinés par leurs amis politiques. L’affaire Hentsch qui a défrayé la chronique en 1933 apparaît comme caractéristique. Jeune homme de 26 ans, Hentsch est membre du groupe national-socialiste de Dresde . Il est chef de section de S.A., connaît la disgrâce à la suite de conflits internes, il disparaît, c’est le silence..  Quelque temps après, on retrouve son cadavre dans l’eau près d’une écluse. Hentsch était ficelé, il avait reçu en pleine poitrine une balle de revolver. 

 

commentaires après l’exécution des membres des S.A

 

Les Troupes d'Assaut, leurs caractères, aventuriers courageux mais féroces, épris de danger et de combats, ayant derrière eux tout un passé de corps francs, de meurtres politiques, ou du moins de guerre civile larvée, les cadres des S.A. n'avaient plus de révolution à se mettre sous la dent. Ils rongeaient leur frein avec de plus en plus d'impatience et parlaient de plus en plus d'une deuxième révolution ...

Mais, objectera-t-on, Hitler avait con­nu de près cette vie des « Réprouvés », si profondément comprise par von Salo­mon dans son livre fameux. En outre les Roehm, les Ernst, les Heines avaient été pour lui des soldats extraordinaires, des amis même... Comment pouvait-il brus­quement se résigner à leur substituer la Reichswehr ? Et ensuite à les exécuter som­mairement ?

 

…. par ses représentants qualifiés, les exécutions auxquelles ils ont procédé ce jour-là et le lendemain, relev­aient bien d'une opération préventive devenue nécessaire.

Mais pourquoi cette opération préven­tive était-elle devenue nécessaire ? Tout simplement parce que l'état d'esprit d'un certain nombre de chefs des S. A. et d'une  fraction de leurs troupes, suivi avec intérêt, et exploité par un certain nombre d'adversaires d'Hitler, risquait, dans un délai relativement court, de provoquer un changement de gouvernement, non même une transformation ou un renversement du régime.

Quelques tractations, d'ailleurs nécessaire­s entre des nationaux-socialistes et des personnalités extérieures au parti, tels que le général von Schleicher et  Strasser, ou quelques rébellions de cadres des S.A., n'auraient pas suffi à provoqu­er une réaction gouvernementale aussi retentissante. Si Hitler a voulu frapper, c'est qu'il s'agissait d’une opération devenue nécessaire, Goering s'était tout spécialement chargé de le démontrer  au chancelier — non seulement de frapper, au sens physique du mot, quelques amis déviants, mais surtout de frapper au delà des cadres, les esprits des mécontents,  et de tous les insatisfai­ts, c'est-à-dire prévenir les futurs mécontents.

 

Textes choisis et aménagés par Jean Aikhenbaum

 

Sources

Je suis partout 1931 – 1934

L’humanité 1934

 

 

 

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